BARAK L’AMERICAIN !
Le monde assiste, dans une sorte d’hébétude euphorique, à l’émergence d’un acteur international plus grand que nature: Barak Obama. La stature de ce fils d’un Kenyan-encore inconnu il y a seulement quatre ans- transcende les races, les cultures, les idéologies, autant politique que religieuse, pour s’inscrire dans quelque chose de plus large, le protocole des grands destins !
EMERY G. UHINDU-GINGALA
Il faudrait remonter, dans ce siècle, jusqu’à Nelson Mandela- et le défunt pape Jean-Paul II -pour revivre une telle cristallisation de la passion autour d’un individu; et dans un registre un tantinet moins flamboyant, une coche en dessous, il y a eu Mikhaïl Gorbatchev, Mère Térésa de Calcutta et Lech Valesa de Solidarnosc.
Michael Jackson mis à part…
Or donc le fait que les deux icones vivantes, Mandela et Obama, soient tous deux des Noirs d’Afrique est une coïncidence de l’histoire que ne manqueront cependant pas de relier les politologues et historiens ; oracles de l’a posteriori…
Mais- et ceci mérite d’être souligné – l’obamania, nouveau cantique cher aux médias du monde entier, réfère d’abord, et avant tout, à l’American Dream. La fulgurante ascension d’Obama, contrairement à Mandela, prend son envol, tout en s’enracinant, aux Etats-Unis.
Et si l’homme lui-même n’a de cesse de rappeler ses origines, comme une manière de reconnaissance envers un pays qui est pourtant le sien, c’est pour mieux confesser le changement des mentalités « d’un formidable pays », ainsi que le reconnait un Georges W. Bush faussement guilleret.
S’il est élu président du plus puissant pays du monde- et même s'il ne l'est pas- Barak Obama aura formidablement marqué l’Histoire. Et les esprits. Partout, mais aux Etats-Unis d’abord. Parce que les multiples facettes de l’identité du candidat démocrate- «…Ma famille est disséminée sur trois continents », fait-il observer- campent Noirs et Blancs, les concernés, dans leur acceptation raciale. Parfois raciste : Obama est un mulâtre, métis issu d’un Noir et d’une Blanche. Loin de marquer un naturel trait d’union entre les deux communautés, cette caractéristique indispose certains, en enchante d’autres, elle est partout et toujours présente même si certains bien-pensants affectent gauchement de l’ignorer. Elle demeure en surimpression sur tout ce que dit, fait, et est Barak Obama. En tous les cas, l’identité du sénateur de l’Illinois ne lui rend guère justice. La couleur de sa peau parle pour lui. C’est cela qui fait l’événement, occultant le charisme, l’intelligence, l’originalité de l’homme. Et pour cause : par une étrange anthropologie, un mulâtre est un Noir ! Non pas pour moitié Blanc et Noir. Le fait est entendu autant chez les Noirs que pour les Blancs. La logique est à ce point poussée dans ses derniers retranchements que même le rejeton d’un Noir et d’une Asiatique- Tiger Woods en est le plus illustre cas- est Noir !
Démocrate et conservateur
Qu’à cela ne tienne, Barak Obama est avant tout un américain. Une fois devenu président, il le sera pour les Américains d’abord. Et seulement. Sur le plan international il ne dérogera en rien sur la politique traditionnelle des Etats-Unis. Ses prises de position, on peut déjà le constater, respectent scrupuleusement le modus operandi des administrations américaines respectives- l’interventionnisme ou l’immobilisme- selon qu’elles sont républicaine ou démocrate. Son intention de redéployer les troupes américaines d’Irak en dix-huit mois (même si l’on ne voit pas comment une telle entreprise serait matériellement possible en un temps si record) répond au souci de ne s’occuper que des intérêts strictement américains. Et l’Irak n’en est manifestement pas.
Il en ainsi pour tous les grands dossiers de politique internationale : l’Iran, la Corée du nord et leurs velléités nucléaires, le conflit israélo-palestinien etc. A Israël- auquel tous les leaders politiques américains réitèrent leur indéfectible loyauté- le sénateur Obama venait d’accorder sans ambages Jérusalem comme capitale. Mais indivisible. Et ce, en un positionnement allant obstinément contre la volonté de la communauté internationale, par résolution de l’Onu interposée. A ce jour, seuls le Salvador et le Costa Rica reconnaissent Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu. La sortie du sénateur Obama, si elle se confirmait dans les faits, ferait l’impasse sur l’établissement de la future capitale palestinienne- Al-Qods -dans la partie orientale de la ville. Exit le projet, appelé des vœux du monde entier, de l’érection d’un état palestinien !
Ce volontarisme, pour le moins curieux et…dangereux pour la paix mondiale, fut manifesté au lendemain de la victoire du sénateur de l’Illinois sur sa rivale à l’investiture démocrate, Hillary Clinton, au demeurant présente à la conférence. Barak Obama s’adressait ainsi devant un panel du lobby juif américain. Il est à souhaiter que ce quasi dérapage reste inscrit au chapitre du zèle électoraliste. Car le candidat noir- dont le père était musulman- se sent constamment obligé d’en faire plus. Pour finir par en faire trop. Tant Obama demeure sur la défensive au chapitre de la religion : que le futur président des Etats-Unis soit un Noir est une chose. Une autre en est qu’il soit adepte de l’Islam…
Un autre alignement au traditionnel repli des démocrates américains : le candidat Obama a dores et déjà annoncé son intention de renégocier l’Alena (Accords de libre échange nord-américain), jugé trop favorable aux partenaires canadiens et mexicains.
Et hormis son adhésion, quelque peu forcée, au plan de couverture médicale nationale cher à la sénatrice Clinton, aucune surprise notable sur les grandes questions sociales internes. La peine de mort, le mariage homosexuel, d’accord pour l’une et pas pour l’autre, l’environnement etc.
Le "Change We Can Believe", slogan destiné aux seuls Américains, toutes races confondues, ne concerne finalement que la gestion des affaires courantes. Les Afro-Américains auraient tort d’y voir enfin un changement de politique à leur égard. A moins que Michelle Obama, une fois installée conséquemment à la droite du président, ne sache inspirer à son époux des programmes sociaux favorables aux Afro-Américains ; ou du moins aux minorités raciales ; y incluant les Premières nations.
La chose ne sera guère aisée d’autant que Obama s’attend, épouvanté, au moment où ses ennemis- et ils sont légion- le taxeront de "président ethnique"
Encore une mauvaise lecture des faits: Barak Obama n'est assurément pas un précurseur, un pionnier ouvrant aux Noirs l’accès à la présidence des Etats-Unis. Les circonstances de l’ascension du sénateur de l’Illinois demeurent exceptionnelles- le momentum l’est plus encore- en rupture radicale avec le cours "logique" du procès politique d’un pays où les démons du racisme demeurent durablement figés dans le temps.
Faut-il le rappeler, la couleur de sa peau n’aura été qu’un mince recours pour le candidat démocrate : aux Etats-Unis une femme blanche- Hillary Clinton- vaut toujours mieux qu’un homme noir. Ou perçu comme tel. Peu d’ailleurs, et ce même parmi les Noirs, avaient cru en lui. Les Afro-Américains, circonspects, souhaitaient "voter utile", persuadés qu’un des leurs ne pouvait l’emporter face à un Blanc. Quel qu’il soit…
Les succès répétés de Barak Obama- lesquels ne sont guère tributaires de la solidarité raciale- ont fini par convaincre les plus réticents. « C’est possible ! » est une conviction qui participe de l’obamania ; et non l’inverse.
S’il emporte le suffrage du peuple américain- les siens !- en novembre prochain, Barak Obama sera un président américain. Pour les Blanc et les Noirs. Contre le reste du monde. Parce qu’il est avant tout un Américain…
Il tempérera ainsi les inquiétudes des uns et l’enthousiasme des autres !
EMERY G. UHINDU-GINGALA
1 Comments:
Excellente analyse. Merci.
Il est des hommes et des plumes de consciences d'un monde de droit, flexible au grand changement. Oser imaginer si Obama pouvait disposer d'un mandat de plus....
Osons rêver un jour que Michelle Obama, poursuive ces missions visionnaires...autre que la chasse à l'obésité...des actions profondes auprès de la jeunesse américaine à l’Horizon 21. Merci à Lady Obama d'encourager son grand homme dans son combat..dans l'ombre...L'histoire lui rendra Hommage … J'en suis sûre!
Entre temps, lisons, essayons de mieux comprendre notre monde en globalité...
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